Naples à Paris
7 juin 2023 – 8 janvier 2024
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À l’heure des ténèbresCaravage (Michelangelo Merisi da Caravaggio, dit) (Milan, 1571 – Porto Ercole, 1610)
La Flagellation
1607
Naples, Museo e Real Bosco di Capodimonte
Une relecture poignante du Christ à la colonne
Dans cette relecture du thème religieux du Christ à la colonne, Caravage supprime toute référence spatiale autre que le sol où se dresse une classique colonne de marbre. Émergeant de la pénombre, trois bourreaux cernent le Christ inexorablement et s’apprêtent à lui infliger le supplice du fouet, la Flagellation. Celui de gauche, avant de frapper rejette violemment la tête de sa victime sur le côté, provoquant une extrême et humiliante extension du cou que l’on trouve habituellement dans les représentations du Couronnement d’épines. Le bourreau de droite, prenant appui sur la jambe du Christ assure les liens qui déjà marquent les bras du supplicié. Aucun signe de souffrance ou de sanguinolente torture autre que celle de la couronne d’épines n’est ici détectable.
Une douloureuse déshumanisation
C’est l’heure des ténèbres. Bourreau ou victime, l’homme entre dans le temps de sa déshumanisation. Le seul bourreau identifiable est celui de gauche. Cependant ses traits sont défigurés par la férocité qui marque son visage de rides profondes, exorbite ses yeux et se déploie dans un cri de haine. L’ombre cache le visage du bourreau de droite, tandis que la tête du jeune homme aux cheveux vaporeux se détache comme en ombre chinoise sur le corps du Christ. Sa position pourrait être celle de l’adoration, mais ses mains sont occupées à la confection d’un nouveau fouet. Le Christ lui-même est dépouillé de son humanité. Son corps est d’une grande beauté, mais semble désarticulé. La tête est désaxée par rapport au buste, lui-même penché sous la pression des bras entravés, tandis que les jambes tentent de trouver un équilibre précaire. Le visage impassible et fermé montre son refus de prendre part, ne serait-ce que par la douleur, à ce qui se déroule.
Ténèbres et lumière
Pourtant, du fond de cette humanité disparue ou humiliée, émerge la lumière, venant dissiper les ténèbres du mal. Dans sa blancheur, le corps du supplicié irradie et se détache de la colonne, infusant le centre de la composition d’une douce clarté.
Le saviez-vous ?
Caravage a réalisé ce tableau pour l’église San Domenico Maggiore pendant son exil à Naples. Il avait été contraint de fuir Rome après avoir tué un homme au cours d’un duel. Malgré tous ses efforts, il ne put jamais y revenir et mourut quelques années plus tard. Après 3 tentatives de vol dans son emplacement initial, l’œuvre fut transférée au musée national de Capodimonte.
Autour de la Passion du Christ
Caravage, La Flagellation, 1607, en dépôt au Museo e Real Bosco di Capodimonte (depuis 1997)
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