Chef d’œuvre de la peinture livresque persane, cette illustre page n’a cessé de fasciner les amateurs et spécialistes depuis sa redécouverte au 19e siècle et son acquisition, en 1887, par l’Union centrale des arts décoratifs. Emblématique de l’esthétique de la peinture persane dont elle serait la quintessence même, célébrée pour son exceptionnelle finesse et la magie incomparable de ses couleurs, elle demeure en partie une énigme.
Ni le manuscrit dont elle provient, ni le peintre qui l’exécuta, ni le lieu de sa réalisation ne nous sont aujourd’hui connus. Quant à son sujet, il n’offre aucun équivalent contemporain ou postérieur au sein de la production picturale de l’Iran. La scène est tirée d’un roman en vers composé en langue persane par le poète Khwaju Kermani (1290-1349 ?), dont l’œuvre inspira fréquemment, au tournant du 14e et du 15e siècle, les peintres attachés à la cour des princes jalayirides et timourides d’Iran. Elle représente la rencontre fantasmée du prince de Syrie Humay avec l’élue de son cœur, la fille de l’empereur de Chine pour laquelle un artiste anonyme a su miraculeusement recréer l’ambiance féérique et onirique propre à toute vision idyllique.
Grâce aux méthodes d’imagerie modernes et à des analyses récentes faites au laboratoire des musées de France, il est possible aujourd’hui de poser un regard en partie renouvelé sur cette œuvre unique et mystérieuse.