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Joute poétique
Mon Louvre par Antoine Compagnon
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Joute poétique
Je crois bien que je n’étais pas revenu dans les salles des Arts de l’Islam depuis leur ouverture dans la cour Visconti, sous un élégant voile de verre et d’aluminium, il y a déjà une dizaine d’années (Denon, 185-187). C’est un lieu privilégié dans le musée, sombre, silencieux, reposant. Je ne sais pourquoi, la lumière et les bruits y sont comme atténués. Peut-être est-ce un prodige de l’architecture moderne (mais les grandes cours de sculptures de l’aile Richelieu ne donnent pas le même sentiment d’accalmie). À l’étage inférieur, un grand cercle de banquettes permet de méditer, voire de s’assoupir. Je ne connais pas d’espace plus hospitalier au Louvre. Les visiteurs retirent leurs chaussures, font un bout de sieste. Non loin d’eux, ces délicates joutes poétiques d’Ispahan, tout un art qui évoque moins la guerre que l’amour, la rivalité dans la composition d’une œuvre de paix.